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adresse dans ceux qui inventèrent ces deux monstrueux dogmes. Et que n’entreprenait-on pas sur un peuple, en se disant les ministres d’un Dieu dont la haine ou l’amour était d’un si grand intérêt pour la vie future ? Quel crédit n’avait-on pas sur l’esprit de gens, qui redoutant des peines ou des récompenses futures, étaient obligés de recourir à ces fourbes, comme aux médiateurs d’un Dieu, seuls capables d’éviter les uns et de valoir les autres ? Toutes ces fables ne sont donc que le fruit de l’ambition, de l’orgueil et de la démence de quelques individus, nourries par l’absurdité de quelques autres, mais qui ne sont faites que pour nos mépris… que pour être éteintes… absorbées dans nous, au point de ne jamais reparaître. Oh ! combien je t’exhorte, ma chère Juliette, à les détester comme moi. Ces systêmes, dit-on, mènent à la dégradation des mœurs. Eh ! mais les mœurs sont-elles donc plus importantes que les religions ? Absolument soumises au degré de latitude d’un pays, elles n’ont et ne peuvent avoir rien que d’arbitraire ; rien ne nous est défendu par la nature ; les loix seules se sont crues autorisées d’imposer de certaines bornes au peuple,