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des freins qu’il demanda. Le plus fort consentit à des loix auxquelles il était sûr de se soustraire : elles se firent. On promulgua que tout homme posséderait son héritage en paix, et que celui qui le troublerait dans la possession de cet héritage éprouverait une punition ; mais, là, il n’y avait rien à la nature, rien qu’elle dicta, rien qu’elle inspira, tout était l’ouvrage des hommes, divisés pour lors en deux classes ; la première, qui cédait le quart, pour obtenir la jouissance tranquille du reste ; la seconde, qui, profitant de ce quart, et voyant bien qu’elle aurait les trois autres portions quand elle voudrait, consentait à empêcher, non que sa classe dépouillât le faible, mais que les faibles ne se dépouillassent point entre eux, pour qu’elle pût seule les dépouiller plus à l’aise. Ainsi, le vol, seule institution de la nature, ne fut point banni de dessus la terre ; mais il y exista sous d’autres formes ; on vola juridiquement. Les magistrats volèrent en se faisant payer pour une justice qu’ils devaient rendre gratuitement. Le prêtre vola en se faisant payer pour servir de médiateur entre l’homme et son Dieu. Le marchand vola en accaparant, en