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a juré qu’il n’aurait pas de supplices assez effrayans pour toi ; et nous ne descendrons pas de la voiture, que nous ne soyons chez lui. Eh bien ! Justine, que penses-tu maintenant de la vertu ? n’eut-il pas mille fois mieux valu laisser brûler tous les enfans de l’univers, que de t’exposer à ce qui t’arrive, pour en avoir voulu sauver un… qui, malheureusement, ne l’est pas ? — Oh ! madame, ce que j’ai fait, je le ferais encore… Vous me demandez mon opinion sur la vertu… je pense qu’elle est souvent la proie du crime… qu’elle est heureuse, quand elle triomphe, mais qu’elle doit être l’unique objet des récompenses de Dieu dans le ciel, si les forfaits de l’homme parviennent à la flétrir sur terre. — Tu ne seras pas long-tems, Justine, sans savoir s’il est vraiment un Dieu qui punisse ou qui récompense les actions des hommes… Ah ! si dans le néant éternel où tu vas rentrer tout-à-l’heure, il t’était permis de penser, combien tu regretterais les sacrifices infructueux que ton entêtement t’a forcé de faire à des phantômes… qui ne-t-ont jamais payé qu’avec des malheurs !… Il en est encore tems, Justine ; veux-tu devenir ma complice ? Il est plus fort que moi de te voir échouer sans cesse dans les