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où il s’agit de briser les fers du despotisme, la tyrannie d’un père, d’un époux… d’un maître injuste, y réussit-on autrement et plus sûrement que par le poison ? Ah ! si ce suc précieux n’était pas nécessaire à l’homme, la nature nous l’eût-elle donné ? Y a-t-il une seule plante sur la terre qui nous soit inutile, une seule dont elle ne nous accorde la permission d’user à notre gré ! Employons-les donc toutes sans choix aux besoins que cette même nature nous inspire ; que les unes nous substantent et corroborent nos forces ; que celles-ci nous dégagent des humeurs dont la trop grande abondance nuirait à notre santé ; que celles-là nous délivrent des individus qui nous nuisent ou qui nous sont à-charge ; tout cela est à sa place, tout cela est dans l’ordre : la nature l’offre et le prescrit à-la-fois ; il n’y a que les sots qui, ne voulant pas l’entendre, ou la repoussent ou l’interprètent mal.

Mais, monsieur, dit Justine, jamais votre frère ne m’a parlé de semblables horreurs. — Ce ne sont pas ses fantaisies, dit Verneuil : il a une autre manière de faire le mal ; il s’en tient là ; chacun outrage les loix, la religion et les conventions sociales à sa guise, et l’on