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l’entoure, et que ce fût à cause de sa consommation immodérée que ce qui lui serait subordonné mourût de faim. — Oui, oui, répondit la d’Esterval, voilà mon projet parfaitement saisi ; on n’a pas d’idée de ce que je mangerais à un pareil repas ! — Oui ; le repas du sang des hommes, dit Gernande ; Tibère, je crois, en avait conçu quelque chose. — Pour moi, dit d’Esterval j’aime infiniment Néron, qui demande, au sortir de table, « ce que c’est qu’un pauvre[1] » ? — Assurément, dit Bressac, s’il est vrai, comme nous n’en saurions douter, que l’intempérance soit la mère de tous les vices, et que le bourbier des vices soit le paradis terrestre de l’homme, il n’y a rien que nous ne devions faire pour exciter en nous ce qui peut le mieux nous conduire à l’intempérance. Et quelles nouvelles forces, en effet, n’acquérons-nous pas pour les scènes lubriques, lorsque nous y passons au sortir d’une orgie de table ! combien alors nos esprits vitaux se trouvent exaltés ! Il semble qu’une nouvelle chaleur circule dans nos veines ; les objets lubriques s’y peignent avec plus

  1. Voyez le fameux repas de Trimalcion, dans Pétrone.