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mais il était essentiel que je vous fisse connaître mes goûts, et le genre de mort par lequel vous périrez dans cette maison, si vous me trahissez… si seulement vous vous laissez séduire par la femme auprès de laquelle vous allez être mise. Cette femme est la mienne, on vous l’a dit, Justine ; et ce titre est sans doute le plus funeste qu’elle puisse avoir, puisqu’il l’oblige à se prêter journellement à la passion bizarre où je viens de vous soumettre. N’imaginez pas, au reste, que je la traite ainsi par vengeance… par mépris… par aucun sentiment de haine ; c’est la seule histoire des passions. Rien n’égale le plaisir que je goûte à répandre le sang de cette créature ; c’est la plus délicieuse jouissance de mon cœur, je ne me suis jamais amusé avec elle d’une autre manière ; il y a trois ans qu’elle est enchaînée à moi, et qu’elle subit régulièrement, tous les quatre jours, l’opération que vous avez éprouvée. Sa grande jeunesse (à peine a-t-elle vingt ans), les soins particuliers que l’on en a, l’abondante nourriture qu’elle prend, tout cela la soutient : mais avec une sujétion semblable, vous sentez bien que je ne puis ni la laisser sortir ni la montrer à d’autres gens, qu’à ceux qui, ayant à-peu-près les mêmes