Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/90

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

flambeau du libertinage : ce que l’un prête à l’autre est divin, je le sais ; et je ne me porte jamais si bien aux excès de la luxure, que quand je suis gorgée de mêts délicats et de vin capiteux ; mais je n’en ai pourtant pas un tel besoin, que je ne puisse, sans ce stimulant, franchir toutes les bornes de la décence et de la pudeur… tu vas le voir.

À peine sommes-nous sur le port, qu’une foule de porte-faix et de matelots nous aborde. Venez, mes amis, dit Durand, soyez calmes, honnêtes et tranquilles, nous allons vous satisfaire tous. Tenez, voyez cette jolie fille ; c’est une Française[1] ; elle n’est que d’hier dans le commerce ; vous allez la voir se trousser sur la borne, en offrant à vos goûts le côté qui vous plaira le mieux ; je vous branlerai sur ses charmes. Quinze se rangent autour de nous, en ap-

  1. Les putains de cette nation sont extrêmement recherchées dans les pays étrangers. Leur extrême complaisance, leur adresse, leur libertinage et leur beauté leur obtiennent une préférence décidée sur les prostituées des autres nations, presque toujours laides, mal-adroites et sales.