Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/327

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

joues d’albâtre, que la pudeur anima, sous mes lèvres, du plus joli vermillon de la nature. Je la presse contre mon sein, et je sens son petit cœur battre sur ma gorge, comme celui de la jeune colombe qu’on arrache au sein de sa mère. Elle était assez bien vêtue, quoiqu’avec simplicité : un joli chapeau de fleurs, de superbes cheveux blonds, retombant en boucles flottantes sur deux épaules délicieusement coupées. Elle me dit, du son de voix le plus doux et le plus flatteur… madame, je rends grâces au ciel qui me procure l’avantage de vous consacrer ma vie ; je sais que ma mère est morte, et je n’ai plus que vous dans le monde. Alors, ses paupières se sont mouillées, et j’ai souri. Oui, mon enfant ; lui ai-je dit, votre mère est morte ; elle a été mon amie ; elle mourut singulièrement… elle me laissa de l’argent pour vous. Si vous vous conduisez bien avec moi, vous pourrez être riche ; mais tout cela dépendra de votre conduite, de votre aveugle obéissance à toutes mes volontés… Je serai votre esclave, madame, me répondit-elle, en se courbant sur ma main, et je rebaisai sa bouche, une seconde fois, avec un peu plus de détail. Je fis découvrir la gorge…