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nos besoins nous rapprochent, séparons-nous dès que nos intérêts l’exigent, parce que l’égoïsme est la première des loix de la nature, la plus juste, la plus sacrée, sans doute ; n’appercevons jamais dans les autres que des individus faits pour nos passions ou pour nos caprices ; déguisons-nous, si nous sommes les plus faibles ; usons de tous nos droits comme les animaux, si nous sommes les plus forts ; en un mot, au milieu du meurtre et de l’incendie, nous nous sauverons, quatre de mes camarades, toi et moi : oui, nous nous sauverons, je te le promets ; que t’importe ce que le reste deviendra ? Suis-nous.

Par un de ces caprices inexplicables du sort, sa main, qui venait de punir l’innocence dans notre héroïne, servit le crime dans sa protectrice. Le feu prit, l’incendie fut horrible ; il y eut soixante personnes de brûlées ; mais Justine, la Dubois et ses complices se sauvèrent, et gagnèrent, dès la même nuit, la cabane d’un braconnier de la forêt de Bondi, intime ami de la bande.

Te voilà libre, Justine, dit alors la Dubois, tu peux maintenant choisir tel genre de vie qu’il te plaira ; mais si tu suis mes conseils, mon enfant, tu renonceras à ces pratiques de