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sont avantageux qu’à elle, cet enfant doit se tenir engagé par la reconnaissance ; quoi ! je devrais quelque chose à quelqu’un, parce que ce quelqu’un a fait pour moi ce dont je puis me passer à merveille, et ce dont lui seul a besoin ; vous conviendrez qu’une telle façon de penser serait une affreuse extravagance. Voilà donc l’enfant parvenu à l’âge de puberté, sans que nous ayons encore apperçu dans lui, le plus léger motif de gratitude pour sa mère ; que résultera-t-il de ses réflexions, s’il en fait alors ? Ose-t-on le dire, de l’éloignement, de la haine pour celle qui lui a donné le jour ; elle lui a transmis ses infirmités, les mauvaises qualités de son sang, ses vices… une existence enfin, qu’il n’a reçu que pour être malheureux ; y a-t-il là, je vous le demande, de très-grands motifs de reconnaissance, et n’en voyez-vous pas bien plutôt, de la plus forte antipathie ? Il est donc clair que dans toutes les occasions de sa vie, ou l’enfant sera le maître de disposer des jours de sa mère, il le pourra sans le plus petit scrupule, il le devra même décidément, parce qu’il ne peut que détester une telle femme ; que la vengeance est le fruit de la haine, et le meurtre, le moyen de la vengeance ; qu’il