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Nous allons, avec la permission du lecteur, quitter quelque tems cette petite libertine, pour ne nous attacher maintenant qu’a transmettre au public les anecdotes de la vie de notre pudibonde héroïne.

On a beau dire ; il faut un peu de vertu dans le monde, et il est bien plus doux pour un biographe[1] de peindre dans le héros dont il transmet l’histoire, des traits de candeur et de bienfaisance, que de tenir sans cesse l’esprit fixé sur des débauches et des atrocités, comme sera obligé de le faire sans doute, celui qui nous donne par suite de cet ouvrage-ci la très-scandaleuse et très-libertine histoire de l’impudique Juliette.

Justine caressée dès son enfance par la couturière de sa mère, croit que cette femme sera sensible à son malheur ; elle va la trouver, elle lui fait part de ses infortunes, elle lui demande de l’ouvrage… À peine la reconnoît-on ; elle est renvoyée durement. Oh ciel ! dit cette pauvre créature, faut-il que

  1. On nomme ainsi l’homme-de-lettres qui consacre sa plume à écrire la vie des personnes illustres.