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surer que l’action qui le détruisait ne pouvait qu’être horrible ; mais sa vanité, sa démence ne change rien aux loix de la nature, il n’y a point d’être qui n’éprouve au fond de son cœur le desir le plus véhément d’être défait de ceux qui le gênent, ou dont la mort peut lui être avantageuse ; et de ce desir à l’effet, Justine, t’imagines-tu que la différence soit bien grande ? Or, si ces impressions nous viennent de la nature, est-il présumable qu’elles l’irritent ? Nous inspirerait-elle ce qui la dégraderait ? Ah ! tranquilise-toi, chère fille, nous n’éprouvons rien qui ne lui serve, tous les mouvemens qu’elle place en nous, sont les organes de ses loix, les passions de l’homme ne sont que les moyens qu’elle employe pour accélérer ses desseins ; a-t-elle besoin d’individus, elle nous inspire l’amour, voilà des créations ; les destructions lui deviennent-elles nécessaires, elle place dans nos cœurs la vengeance, l’avarice, la luxure, l’ambition, voilà des meurtres ; mais elle a toujours travaillé pour elle, et nous sommes devenus, sans nous en douter, les débiles agens de ses moindres caprices.

Tout dans l’univers est subordonné aux