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bientôt de les subjuguer par les siennes. Il estimait assez l’esprit de cette jeune personne, pour desirer d’y porter le flambeau de la philosophie ; il avait besoin d’ailleurs de détruire en elle tous les préjugés. Voici donc comme il combattit ceux du culte :

Toutes les religions partent d’un principe faux, Justine, lui disait-il un jour ; toutes supposent comme nécessaire l’admission d’un être créateur, dont l’existence est impossible. Rappelles-toi, sur cela, les préceptes censés de ce certain Cœur-de-Fer, qui, dis-tu, avait comme moi, travaillé ton esprit. Rien de plus sages que les principes de ce brigand ; je le vois comme un homme de beaucoup d’esprit, et l’avilissement dans lequel on a la sottise de le tenir, ne lui ôte pas le droit de bien raisonner.

Si toutes les productions de la nature sont des effets résultatifs des loix qui la captivent ; si son action et sa réaction perpétuelles supposent le mouvement nécessaire à son essence, que devient le souverain maître que lui prêtent gratuitement ceux qui ont quelqu’intérêt à l’adopter ? Voilà ce que te disait ce sage instituteur, chère fille. Que sont donc les religions, d’après cela, si-non le frein dont