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teur, s’anéantit aussi-tôt que l’existence de cet auteur est elle-même prouvée chimérique ; écoutez donc, une dernière fois, ce que j’ai à vous objecter sur cet article :

Les premiers hommes, effrayés des phénomènes qui les frappèrent, durent croire nécessairement qu’un agent sublime et inconnu d’eux, en avait dirigé la marche et l’influence ; le caractère de la faiblesse est de supposer ou de craindre la force ; l’esprit de l’homme, encore trop dans l’enfance pour trouver dans le sein de la nature les loix du mouvement, seuls ressorts de tout le mécanisme dont il s’étonnait, crut plus simple de supposer un moteur à cette nature que de la croire motrice elle-même ; et, sans réfléchir qu’il aurait encore plus de peine à édifier, à définir ce maître gigantesque, à concilier avec les qualités qu’il lui prêtait tous les défauts que ses opérations nous démontrent ; qu’il aurait, dis-je, plus de peine à tout cela, qu’à trouver dans l’étude de la nature la cause de ce qui le surprenait, il s’étourdit, il s’aveugla au point d’admettre ce premier Etre, et de lui ériger des cultes. De ce moment, chaque nation s’en composa d’analogue à ses mœurs, à ses connaissances et à son climat. Il y eut