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tesse ! quelle extravagance ! Eh ! non Justine, il n’y a point de Dieu ; ce fut au sein de l’ignorance, des alarmes et des malheurs, que les mortels puisèrent leurs sombres et dégoûtantes notions sur la divinité ; que l’on examine toutes les religions, et l’on verra que les idées de ces agens puissans et imaginaires furent toujours associées à celles de la terreur. Nous tremblons aujourd’hui, parce que nos ayeux frémirent il y a plusieurs siècles. Si nous remontions à la source de nos craintes actuelles, et des pensées lugubres qui s’élèvent dans notre esprit, toutes les fois que nous entendons prononcer le nom de Dieu, nous les trouverions dans les déluges, les révolutions et les désastres qui ont détruit une partie du genre humain, et consterné les malheureux échappés au bouleversement de la terre ; si le Dieu des nations fut enfanté dans le sein des alarmes, ce fut encore dans celui de la douleur que chaque homme façonna la puissance inconnue qu’il se fit pour lui-même ; ce fut donc toujours dans l’atelier de la frayeur et de la tristesse, que l’homme malheureux créa le ridicule phantôme dont il fit son Dieu ; et, qu’avons-nous besoin de ce moteur, quand l’étude