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LA MARQUISE DE GANGE

l’incertitude. — Elle est affreuse, je n’aurai jamais la force de la supporter. — Éclaire-toi donc, et ne balance plus. — Et qui puis-je employer pour cette épreuve ? — Ambroisine. — Des amis… chez moi ? Et que dirait cette mère respectable ? — Je ne dis pas qu’il faille porter les choses trop loi ; et la mère et la fille sont faites pour être respectées, sans doute. Au reste, il serait très possible que tu pusses parvenir à ce que je te propose, sans qu’Ambroisine fût dans la confidence, et sans que sa modestie en fût par conséquent alarmée : il ne s’agit que de feindre… de lui rendre quelques soins un peu plus particuliers, et qui, dans le fond, n’auront aucun motif réel. — Et tu crois que les résultats de cette ruse… — Seront de te prouver l’innocence ou la culpabilité de ta femme. Le moyen est infaillible : essaye-le sans crainte. — J’y consens, dit le marquis, mais que cela ne t’empêche pas de me rendre les services que tu m’as promis. — Sois sûr que je surveillerai la conduite du comte et celle de ta femme, et que tu seras instruit chaque jour des plus minutieuses particularités.

De ce moment, l’abbé crut qu’il n’y avait pas un instant à perdre pour prévenir Villefranche du rôle qu’il avait à jouer. — La marquise t’écoutera, lui dit-il, cela est convenu ; ne brusque rien pourtant : ce n’est que par ruse qu’elle consent à t’entendre ; et c’est pour exciter dans son époux