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LA MARQUISE DE GANGE

que procurent nos frivoles monuments modernes, où l’on n’aperçoit jamais que de l’inutile au lieu du nécessaire, de la fragilité au lieu du solide, et de l’indécence au lieu du bon goût.

On était alors au commencement de l’automne… de cette saison romantique, plus éloquente encore que le printemps, en ce qu’il semble que, dans celle-ci, la nature n’agisse que pour elle : c’est une coquette qui veut plaire, au lieu que c’est à nous qu’elle s’adresse dans celle-là : c’est une mère qui fait ses adieux à ses enfants, en les accompagnant de ses dons les plus doux. Cette manière touchante dont elle se dépare pour se faire regretter ; ces présents dont elle nous avertit de remplir nos fruitiers et nos magasins, en attendant qu’elle nous accorde de nouvelles faveurs ; tout, jusqu’à cette teinte pâle dont ses feuilles se couvrent pour nous annoncer le sort qui nous attend, jusqu’à ces soucis, ces pavots, dont elle remplace le muguet et la rose : tout, dis-je, est intéressant dans elle, tout est l’image de la vie, et pas un seul de ses procédés qui ne contienne une leçon pour l’homme.

Un très grand parc environnait le château de longues allées de tilleuls, de mûriers, de méliers, et de chênes verts partageaient en quatre petites forêts cet espace de deux cents arpents, où différentes espèces d’animaux se propageaient pour les plaisirs de la chasse.