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LA MARQUISE DE GANGE

de Julie où elles arrivèrent sur les cinq heures du matin.

Une chambre est offerte à Euphrasie, qui, voyant beaucoup de femmes déjà levées dans cette maison, y achève sa nuit avec un peu plus de tranquillité. Cependant des voix d’hommes et des bruits fort singuliers la réveillent de bonne heure ; on allait même entrer dans sa chambre sans les précautions qu’elle avait prises en se couchant. Elle se lève, elle appelle Julie… mais quelle est sa surprise d’apercevoir au jour qu’elle laisse entrer en ouvrant un homme en désordre, et qui s’introduit dans le lit qu’elle quitte… Elle veut fuir… Julie l’arrête en paraissant. — Que désirez-vous, madame (puis en montrant l’homme) monsieur ne s’est-il pas bien conduit ? — Que me dites-vous ? Quel est cet homme ? comment se trouve-t-il là ?… Ah ! je vois bien que je suis encore dans la main des traîtres. Puis, repoussant Julie avec fureur : — Laissez-moi sortir, vous dis-je ; vous êtes tous ici déchaînés pour me perdre ! — Non, non, madame, disent à la fois ses deux frères qui entrent avec précipitation… non pour vous perdre, mais pour vous arracher à l’infamie où vous ne cessez de vous plonger. Julie faites monter quelques-unes de vos commensales : il est juste qu’elles viennent féliciter leur nouvelle compagne. Alors cinq ou six créatures détestables entrent avec de grands éclats de rire,