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LA MARQUISE DE GANGE

s’aime. Cependant, ajouta-t-il à sa femme, je suis loin de vouloir vous déplaire, et toujours vos désirs seront des lois pour moi. — D’ailleurs, dit le chevalier, continuant d’être fort ému près de la marquise, nous nous réunirons les étés à Gange. — Oh ! je l’espère, dit Alphonse, et je me flatte aussi que les désagréments éprouvés dans ce château par ma chère Euphrasie s’oublieront auprès d’un époux qui ne cessera jamais de l’adorer.

Toute la famille dîna chez madame de Châteaublanc, et l’on fut le soir à l’assemblée chez le duc de Gadagne, qui faisait pour lors les honneurs d’Avignon.

La marquise, qui était attendue, avait attiré toute la ville ; elle parut au milieu du cercle comme l’astre du printemps, que n’ont point obscurci quelques nuages d’hiver. Une sorte de langueur, répandue sur toute sa personne ; ce léger balancement d’une taille souple et légère, qui donnait, en la voyant, l’idée d’une branche de roses qu’agite un instant le Zéphyr ; ces tresses de cheveux bruns artistement enlacés sur la plus belle tête ; ces moindres gestes, qui prêtaient une grâce de plus à chacun de ses mouvements ; ce son de voix flatteur qui ne se faisait entendre que pour prononcer des choses spirituelles et douces ; la réunion de tant de charmes enfin produisit une exclamation générale, quand elle entra dans le salon ;