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LA MARQUISE DE GANGE

C’est qu’elle existe dans les faits ; c’est que rien n’est plus romanesque que cette tragique aventure, et que nous eussions dénaturé les faits en les décolorant ; mais si rien n’a pâli sous nos pinceaux, nous pouvons assurer de même que rien ne s’y est obscurci. À Dieu ne plaise que nous nous soyons permis de rendre le tableau plus noir qu’il ne l’est ! cela serait impossible, même à celui qui en aurait le dessein.

Nous protestons donc avec assurance que nous n’avons en quoi que ce puisse être, altéré la vérité des faits : les affaiblir eût nui à nos intérêts ; les noircir eût fait refluer sur nous l’exécration si bien due aux monstres à qui l’on doit de les avoir tels.

Que les personnes qui veulent acquérir des connaissances exactes sur l’histoire de la malheureuse marquise de Gange nous lisent donc avec l’intérêt qu’inspire la vérité ; et que ceux qui aiment à trouver un peu de fiction, même dans les narrations purement historiques, ne nous blâment point de n’avoir employé que celle où la vérité se retrouve à chaque ligne, le fait pur et simple, sans les accessoires dont nous l’avons entouré, ne pouvant soutenir la lecture ; et, quand on sait que le sujet qu’on traite doit nécessairement révolter, il est bien permis de l’environner de tout ce qui prépare l’âme à le recevoir sans un trop cruel déchirement.