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LA MARQUISE DE GANGE

très déterminée à rejeter de pareils vœux, se trouva néanmoins fort embarrassée : elle voyait dans quel abîme de malheurs allait la précipiter son refus ; et, d’autre part, quelle répugnance invincible n’éprouvait-elle pas à la criminelle liaison qu’on osait lui proposer ! Trahir à la fois ses devoirs, son époux, sa vertu, devenait une chose impossible pour elle : son émotion fut donc terrible ; mais sa pudeur, sa religion, ses sentiments ne cessant de la soutenir : — Sortez, monsieur, sortez, dit-elle fièrement à Théodore. Je croyais trouver en vous un ami, et je n’y vois qu’un séducteur… Sortez, vous dis-je, je saurai soutenir le fardeau de mes peines… Peut-être est-il supportable encore… Il serait plus cuisant pour moi que le plus affreux des supplices, si je l’aggravais par une telle action.

— Je crois, madame, que vous voyez mal, dit l’abbé en se retirant : n’importe, je vous laisse à vos réflexions, persuadé que les circonstances les ramèneront en ma faveur. — Il n’en est aucune qui puisse me faire oublier vos torts et mon époux, dit Euphrasie, et je ne crois pas qu’il en naisse jamais aucune qui puisse m’entraîner dans le crime.