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LA MARQUISE DE GANGE

voici l’acte par lequel elle se liait au chef, qui a avoué avoir obtenu cet écrit d’elle, sans aucune contrainte, et a joint à cette déposition des aveux bien plus défavorables encore aux mœurs et à la vertu de cette dame. Connaissant vos alliances avec la maison de Gange, nous avons cru devoir en remettre la dame entre vos mains, avant que de la traduire en justice. À ces mots, l’officier se retire, et la marquise reste seule avec le prélat.

— Voilà une conduite bien extraordinaire, madame, dit le vénérable pasteur. — Je conviens, répondit Euphrasie, que toutes les apparences sont contre moi ; mais, si vous écoutez mon récit, j’espère que sa franchise vous désabusera ; et le prélat, ayant fait asseoir la marquise, l’écouta avec autant de bonté que d’attention. Euphrasie ne cacha rien ; elle eut seulement la prudence de n’attribuer qu’à de faux bruits répandus sur son époux la démarche inconsidérée qu’elle avait faite avec le comte de Villefranche. Son arrestation par Deschamps fut présentée avec la plus stricte vérité ; et quand elle en fut aux prétendues faiblesses qu’on lui attribuait avec Deschamps, et à l’écrit qui en motivait l’aveu, elle nia tout de ce ton énergique qui n’appartient qu’à l’innocence.

— Madame, répondit le prélat, avec cette candeur et cette naïveté, véritable apanage des pères de l’Évangile, votre physionomie serait bien trompeuse, si vous en imposiez ; mais, dans