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L’ŒUVRE DU MARQUIS DE SADE

blée fit l’autre jour à la pièce que je soumis à son jugement ; je vous prie, monsieur, de vouloir bien m’inscrire pour une nouvelle lecture, encore deux ou trois semblables à la dernière [ici un, deux ou trois mots raturés que je n’ai pu déchifrer], et il est parfaitement sûr que je n’importunerai plus, monsieur, ni vous, ni la Comédie-Française.

J’ai l’honneur d’être bien sincèrement, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

De Sade.

Ce 17 février 1791[1].


Messieurs,

Permettez que j’aie l’honneur de vous rappeler sans cesse les sentiments d’estime et d’attachement qui, depuis des années, me lient à votre théâtre, j’en ai fait profession dans tous les temps, j’ose dire même (et les preuves existent) que, pour avoir pris avec trop de chaleur votre parti lors de vos derniers troubles, vos ennemis m’ont écrasé dans des papiers publics, sans que jamais rien m’ait découragé : la récompense de mon attachement a été votre refus du dernier ouvrage que je vous ai lu et qui, j’ose le dire, n’était pas fait pour être traité si sévèrement.

Quelque chagrin que m’ait fait éprouver ce refus formel, rigoureux et général, je ne vous en consacre pas moins à l’avenir et ce qui reste dans mon portefeuille et ce qui le remplira de nouveau. Mais, messieurs, permettez que, traité par vous si rigoureusement dans l’occasion que je viens de citer, j’éprouve au moins et votre indulgence et votre équité sur deux autres objets.

Vous avez depuis longtemps une pièce à moi, unanimement reçue par vous[2] dès que j’accepte tous les arrangements qu’il vous a plu de faire avec les auteurs, je vous demande avec instance, messieurs, de la faire passer le plus tôt possible, donnez-moi cet encouragement, je vous en supplie ; cela doit vous être facile s’il est vrai, ainsi qu’on le dit, que plusieurs auteurs, ne voulant pas adopter vos arrangements, aient retiré leurs

  1. Lettre inédite.
  2. Le Misanthrope par amour ou Sophie et Desfrancs, « comédie en trois actes et en vers libres ».