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profonde ſageſſe, que nous lui reconnaiſſons dans tout, de permettre ce qui l’offenſerait ; ſecondement, ces pertes ſont cent & cent millions de fois par jour exécutées par elle-même, les pollutions nocturnes, l’inutilité de la ſemence, dans le tems des groſſeſſes de la femme, ne ſont-elles pas des pertes autoriſées par ſes loix, & qui nous prouvent que, fort peu ſenſible à ce qui peut réſulter de cette liqueur où nous avons la folie d’attacher tant de prix, elle nous en permet la perte avec la même indifférence qu’elle y procède chaque jour ; qu’elle tolère la propagation, mais qu’il s’en faut bien que la propagation ſoit dans ſes vues ; qu’elle veut bien que nous nous multiplions, mais que ne gagnant pas plus à l’un de ces actes qu’à celui qui s’y oppoſe, le choix que nous pouvons faire lui eſt égal ; que nous laiſſant les maîtres de créer, de ne point créer ou de détruire, nous ne la contenterons ni ne l’offenſerons davantage en prenant dans l’un ou l’autre de ces partis, celui qui nous conviendra le mieux ; & que celui que nous choiſirons, n’étant que le réſultat de ſa puiſſance & de ſon action ſur nous, il lui plaira toujours bien plus ſurement qu’il ne courra riſque de l’offenſer. Ah ! croyez-le, Théreſe, la Nature s’inquiète bien peu de ces myſtères dont nous avons l’extravagance de lui compoſer un culte. Quel que ſoit le temple où l’on ſacrifie, dès qu’elle permet que l’encens s’y brûle,

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