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remplacée ; à peine s’était-il trouvé dans ſes mains que le dard s’élançant du carquois menaçait déjà vivement tout ce qui l’entourait. — Suzanne, dit Roland, voilà d’effrayans ſuccès… C’eſt ton arrêt, Suzanne ; je le crains, continuait cet homme féroce en lui pinçant, en lui égratignant les mamelles. Quant aux miennes il les ſuçait & les morcillait ſeulement. Il place enfin Suzanne à genoux ſur le bord du ſopha, il lui fait courber la tête, & jouit d’elle en cette attitude, de la maniere affreuſe qui lui eſt naturelle : réveillée par de nouvelles douleurs, Suzanne ſe débat, & Roland qui ne veut qu’eſcarmoucher, content de quelques courſes, vient ſe réfugier dans moi au même temple où il a ſacrifié chez ma compagne qu’il ne ceſſe de vexer, de moleſter pendant ce temps-là. — Voilà une Catin qui m’excite cruellement, me dit-il, je ne ſçais ce que je voudrais lui faire. — Oh ! Monſieur, dis-je, ayez pitié d’elle ; il eſt ; impoſſible que ſes douleurs ſoient plus vives. — Oh ! que ſi, dit le ſcélérat… On pourrait… Ah ! ſi j’avais ici ce fameux Empereur Kié l’un des grands ſcélérats que la Chine ait vus ſur ſon trône[1], nous ferions bien autre choſe vraiment.

  1. L’Empereur Chinois Kié avait une femme auſſi cruelle & auſſi débauchée que lui, le ſang ne leur coûtait rien à répandre, & pour leur ſeul plaiſir, ils en verſaient journellement des flots ; ils avaient dans l’intérieur de leur Palais, un cabinet