mes mains… Ô juſte Ciel ! je ſaiſis la tête d’un
cadavre ! Grand Dieu ! penſai-je épouvantée, tel
eſt ici ſans doute, on me l’avait bien dit, le cimetiere
où ces bourreaux jettent leurs victimes ; à
peine prennent-ils le ſoin de les couvrir de terre !…
Ce crâne eſt peut-être celui de ma chere Omphale,
ou celui de cette malheureuſe Octavie,
ſi belle, ſi douce, ſi bonne, & qui n’a paru ſur
la terre que comme les roſes dont ſes attraits étaient
l’image ! Moi-même, hélas ! c’eût été là ma place,
pourquoi ne pas ſubir mon ſort ? Que gagnerai-je
à aller chercher de nouveaux revers ? N’y ai-je
pas commis aſſez de mal ? N’y ſuis-je pas devenue
le motif d’un aſſez grand nombre de crimes ?
Ah ! rempliſſons ma deſtinée ! Ô terre entr’ouvre-toi
pour m’engloutir ! C’eſt bien quand on eſt
auſſi délaiſſée, auſſi pauvre, auſſi abandonnée que
moi, qu’il faut ſe donner tant de peines pour
végéter quelques inſtans de plus, parmi des monſtres !…
Mais non, je dois venger la Vertu dans
les fers… Elle l’attend de mon courage… Ne
nous laiſſons point abattre… avançons : il eſt
eſſentiel que l’univers ſoit débarraſſé de ſcélérats
auſſi dangereux que ceux-ci. Dois-je craindre de
perdre trois ou quatre hommes pour ſauver des
millions d’individus que leur politique ou leur
férocité ſacrifie.
Je perce donc la haie où je me trouve ; celle-ci était plus épaiſſe que l’autre : plus j’avançais, plus