vait fait la grace de m’y comprendre ; les filles de
garde y étaient auſſi. Dès en entrant nous vimes
notre nouvelle compagne. — Voilà celle que la ſociété
deſtine à remplacer Omphale, Meſdemoiſelles,
nous dit Sévérino, & en diſant cela, il
arracha du buſte de cette fille les mantelets, les
gazes dont elle était couverte, & nous vimes une
jeune perſonne de quinze ans, de la figure la plus
agréable & la plus délicate : elle leva ſes beaux
yeux avec grace ſur chacune de nous ; ils étaient
encore humides de larmes, mais de l’intérêt le plus
vif ; ſa taille était ſouple & légère, ſa peau d’une
blancheur, éblouiſſante, les plus beaux cheveux du
monde, & quelque choſe de ſi ſéduiſant dans l’enſemble,
qu’il était impoſſible de la voir ſans ſe
ſentir involontairement entraîné vers elle. On la
nommait Octavie. Nous ſçumes bientôt qu’elle
était fille de la premiere qualité, née à Paris
& ſortant du Couvent pour venir épouſer le
Comte de *** : elle avait été enlevée dans ſa
voiture avec deux gouvernantes & trois laquais ;
elle ignorait ce qu’était devenue ſa ſuite ; on
l’avait priſe ſeule vers l’entrée de la nuit, &
après lui avoir bandé les yeux, on l’avait conduite
où nous la voyions ſans qu’il lui fût devenu
poſſible d’en ſavoir davantage.
Perſonne ne lui avait encore dit un mot. Nos quatre libertins un inſtant en extaſe devant autant de charmes n’eurent la force que de les admirer.