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À MA BONNE AMIE.

Oui, Constance, c’est à toi que j’adresse cet Ouvrage ; à la fois l’exemple & l’honneur de ton sexe, réunissant à l’ame la plus sensible l’esprit le plus juste & le mieux éclairé, ce n’est qu’à toi qu’il appartient de connaître la douceur des larmes qu’arrache la Vertu malheureuſe. Détestant les sophismes du libertinage & de l’irréligion, les combattant ſans, cesse par tes actions & par tes diſcours, je ne crains point pour toi ceux qu’à nécessités dans ces Mémoires le genre des perſonnages établis ; le cynisme de certains crayons (adoucis néanmoins autant qu’on l’a pu) ne t’effrayera pas davantage ; c’est le Vice qui, gémissant d’être dévoilé, crie au scandale auſſitôt qu’on l’attaque. Le procès du Tartufe fut fait par des bigots ; celui de Juſtine sera l’ouvrage des libertins, je les redoute peu : mes motifs dévoilés

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