Page:Sade - Historiettes contes et fabliaux, 1926.djvu/293

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE MARI PRÊTRE
275


déjeuner à son ami de St-Hilaire avec le projet de lui proposer une partie de chasse, après avoir vidé quelques bouteilles de vin de Lanerte, Gabriel crut voir dans la circonstance l’instant propice à ses désirs. — Oh ventrebleu, monsieur le viguier, dit le moine à son ami, que je suis bien aise de vous voir aujourd’hui, vous ne sauriez venir plus à propos pour moi, j’ai une affaire de la plus grande importance où vous m’allez être d’une utilité sans exemple. — De quoi s’agit-il, père ? — Vous connaissez le nommé Renoult de votre ville ? — Renoult le chapelier. — Précisément. — Eh bien ? — Eh bien, ce drôle-là me doit cent écus et je viens d’apprendre tout à l’heure qu’il est à la veille d’une faillite, peut-être à l’heure que je vous parle est-il déjà sorti du Comtat… il faut que j’y vole absolument et je ne le puis. — Qui vous empêche ? — Ma messe, ventrebleu, ma messe qu’il faut que je dise, je voudrais que la messe fût au diable et les cent écus dans ma poche. — Comment, on ne peut pas vous en faire grâce ? — Oh vraiment oui, grâce ! nous sommes trois ici, si nous ne disions pas chaque jour trois messes, le gardien qui n’en dit jamais nous dénoncerait en cour de Rome ; mais il y a un moyen de me servir, mon cher, voyez si vous voulez le prendre, il ne tient qu’à vous. — Eh