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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX


un drôle comme toi de nous traiter d’hérétiques. Le président qui était toujours au lit à côté de la négresse, lui avait dans la chaleur de sa narration appliqué un si rude coup de poing sur le nez que la malheureuse s’était échappée en hurlant comme une chienne à laquelle on enlève ses petits. — Eh bien, eh bien, de la fureur mon ami, dit d’Olincourt en s’approchant du malade, président, est-ce comme cela qu’on se conduit ? vous voyez bien que votre santé s’altère et qu’il est essentiel de songer à vous. — À la bonne heure, quand on me parlera comme cela, j’écouterai, mais m’entendre traiter d’hérétique par ce balayeur de St-Come, vous m’avouerez que c’est ce que je ne puis souffrir. — Il n’y a pas pensé, mon cher frère, dit la marquise avec aménité, éréthisme est le synonyme d’inflammation, il ne le fut jamais d’hérésie. — Ah ! pardon, madame la marquise, pardon, c’est que j’ai quelquefois l’ouïe un peu dure. Allons que ce grave disciple d’Averroès avance et parle, je l’écouterai… je ferai plus, j’exécuterai ce qu’il me dira. Delgatz que la bouillante sortie du président avait fait tenir à l’écart, de peur d’être traité comme la négresse, se ravança vers le bord du lit. — Je vous le répète, monsieur, dit le nouveau Galien en reprenant le pouls de son malade,