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LE PRÉSIDENT MYSTIFIÉ
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femme, on ne se précipite pas sans cesse dans une étable à cochons. — Nous le verrons, dit la jeune Téroze en poussant un gros soupir, nous le verrons, monsieur, mais si vous m’aimiez comme je vous aime, en vérité tous ces malheurs-là ne vous arriveraient pas. Le souper fut très gai, la marquise y fut aimable et méchante, elle paria contre son mari, en faveur des succès de son beau frère et l’on se retira. Les toilettes se font à la hâte, Mlle de Téroze supplie son mari par pudeur, de ne souffrir aucune lumière dans sa chambre, celui-ci trop battu pour rien refuser, accorde tout ce qu’on veut, et l’on se met au lit ; plus d’obstacles, l’intrépide président triomphe, il cueille ou croit cueillir enfin cette fleur précieuse à laquelle on a la folie d’attacher tant de prix ; cinq fois de suite il est couronné par l’amour, lorsque le jour venu, les fenêtres s’ouvrent, et les rayons de l’astre qu’elles laissent pénétrer dans la chambre viennent enfin offrir aux yeux du vainqueur la victime qu’il vient d’immoler… Juste ciel, que devient-il quand il aperçoit une vieille négresse au lieu de sa femme, qu’il voit une figure aussi noire que hideuse remplacer les attraits délicats dont il s’est cru possesseur ! Il se jette en arrière, il s’écrie qu’il est ensorcelé, quand sa femme arrivant elle-même, et le sur-