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LE PRÉSIDENT MYSTIFIÉ
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billez-vous, mon astre, je me sens un peu de pesanteur, et je voudrais, s’il est possible, terminer notre opération avant que le sommeil ne vienne à m’emporter tout à fait. Mais comme Mlle de Téroze, selon l’usage des jeunes mariées, ne pouvait venir à bout de sa toilette, qu’elle ne trouvait jamais ce qu’il lui fallait, qu’elle grondait ses femmes et ne finissait point, le président qui n’en pouvait plus, se décida à se mettre au lit, se contentant de crier pendant un quart d’heure : Mais venez donc, parbleu, venez donc, je ne conçois pas ce que vous faites, tout à l’heure il ne sera plus temps. Cependant rien n’arrivait, et comme dans l’état d’ivresse où était notre moderne Lycurgue, il était assez difficile de se trouver la tête sur un chevet sans s’y endormir, il céda au plus pressant des besoins, et ronflait déjà comme s’il eût jugé quelque catin de Marseille, avant que Mlle de Téroze n’eût encore changé de chemise. — Le voilà bien, dit aussitôt le comte d’Elbène, en entrant doucement dans la chambre, viens, chère âme, viens me donner les heureux moments que ce grossier animal voudrait nous ravir. Il entraîne en disant cela l’objet touchant de son idolâtrie ; les lumières s’éteignent dans l’appartement nuptial, dont le parquet se garnit à l’instant de matelas, et au