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AUGUSTINE DE VILLEBLANCHE
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Mademoiselle Augustine de Villeblanche dont nous venons de voir une partie de la logique, restée maîtresse de ses actions à l’âge de vingt ans, et pouvant disposer de trente mille livres de rentes, s’était décidée par goût à ne se jamais marier ; sa naissance était bonne, sans être illustre, elle était fille d’un homme qui s’était enrichi aux Indes, n’avait laissé qu’elle d’enfant, et était mort sans jamais pouvoir la décider à un mariage. Il ne faut pas se le dissimuler, il entrait infiniment de cette sorte de caprice dont Augustine venait de faire l’apologie, dans la répugnance qu’elle témoignait pour l’hymen ; soit conseil, soit éducation, soit disposition d’organe ou chaleur de sang (elle était née à Madras), soit inspiration de la nature, soit tout ce que l’on voudra enfin, mademoiselle de Villeblanche détestait les hommes, et totalement livrée à ce que les oreilles chastes entendront par le mot de saphotisme, elle ne trouvait de volupté qu’avec son sexe et ne se dédommageait qu’avec les Grâces du mépris qu’elle avait pour l’Amour.

Augustine était une vraie perte pour les hommes : grande, faite à peindre, les plus beaux cheveux bruns, le nez un peu aquilin, des dents superbes, et des yeux d’une expression, d’une