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ISABELLE DE BAVIÈRE


sainte tout ce qu’on pouvait exprimer de plus fort contre les abus monstrueux de ce siècle pervers ; et débutant par le tableau de la misère du peuple :

« Ô vous, s’écria-t-il, vous, homme du siècle, que le bonheur rend insensible au sort de l’infortune, quittez un moment ces attributs scandaleux qui vous dérobent le spectacle affligeant des malheurs du pauvre ; veuillez me suivre dans les tristes asiles où il se réfugie, bien moins pour cacher sa misère que pour dérober les larmes qui l’humilient. N’est-il donc pas un homme comme vous, ce malheureux qui languit abattu sur le sein de la compagne de ses douleurs, tandis qu’elle gémit elle-même de l’obligation de transmettre aux gages débiles de sa tendresse conjugale une existence qu’elle se sent hors d’état de leur conserver. Comme vous, cet homme a brûlé d’un vertueux amour ; mais ses lèvres flétries ne peuvent plus en articuler l’expression… Il a été sensible comme vous, et vous pouvez ne pas l’être pour lui !… Borné dans ses désirs aux choses purement nécessaires, que votre orgueil méprise, il y attache autant de prix que vous mettez d’importance aux frivolités d’un luxe révoltant. Il pleure, vous le repoussez ; il vous implore, vos oreilles se ferment ; vous rejetez sur la crainte d’émouvoir votre sensibilité celle que vous avez de partager la sienne. Un même principe vous a