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ISABELLE DE BAVIÈRE


chez le boulanger, et voit son connétable noyé dans les flots de sang, que l’on s’efforce d’étancher. « Ô mon cher Clisson, lui dit-il, qui t’a pu mettre en cet état ? — Sire, répond le connétable, ce sont vos ennemis autant que les miens : car vous savez combien j’aime votre majesté, et ces malheureux ne me le pardonnent pas. — Mais qui donc, mon ami ? nomme-le. — Sire, c’est Craon, je l’ai reconnu ; c’est lui qui m’a si lâchement fait assassiner : je ne le nomme que parce que ceux qui me traitent ainsi ne sauraient vous aimer. — Connétable, dit le roi, ce double motif est inutile pour que je punisse ce vil assassin. Je vengerais peut-être moins chaudement ton outrage si je m’occupais du mien. »

Cependant, les gens de l’art arrivent. « Regardez mon connétable, leur dit Charles, et que je sache ce que je dois en espérer ; car ses douleurs sont les miennes propres : je vous récompenserai mieux de le guérir, que des soins que vous prendriez pour moi… » Et le bon Charles, se courbant sur le connétable, mouilla de ses pleurs les plaies de son ami. « Sire, dit Clisson attendri, si je regrette ce sang étanché par vos larmes, c’est dans l’impossibilité où son effusion va me mettre de pouvoir achever de le perdre pour vous, en le versant dans les champs de l’honneur. — Conné-