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ISABELLE DE BAVIÈRE


ombres, que pour mieux effrayer les coupables. Pas une âme ne circule dans les rues ; le silence qu’on y voit régner est l’image de la mort.

Il y avait eu ce soir-là une fête à l’hôtel Saint-Paul, où se tenait ordinairement la cour, et le bal qui suivit le souper avait rempli la moitié de la nuit.

Le connétable venait de quitter la cour ; il se retirait à son palais situé sur l’emplacement qu’occupa depuis l’hôtel de Soubise. Il était une heure du matin, lorsque escorté de huit hommes, portant des flambeaux, Clisson traverse la rue Culture Sainte-Catherine. Quelques assassins, se mêlant parmi les valets de Clisson, éteignent les flambeaux de ceux-ci, le connétable ne voyant plus à qui il a affaire, mais dont la franchise et la loyauté ne peuvent soupçonner un mal qu’il serait lui-même incapable de commettre, croit que cette scène n’est qu’un tour du duc d’Orléans. « Je vous devine, mon prince, s’écrie-t-il, et je pardonne à votre jeunesse une plaisanterie, qui pourtant ne convient ni à vous ni à moi. »

À ces mots, Craon se fait connaître : Connétable, dit-il, ce n’est pas le duc d’Orléans, c’est moi… moi qui veux délivrer la France de son plus mortel ennemi ; point de quartier, il faut mourir. Tuez, tuez, poursuivit ce lâche à ceux qui le suivent, et n’épargnez surtout aucun de ceux qui le défendront.