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tion du Ciel ne vous abandonnera jamais… » Annette serrait les mains de Paul ; elle fondait en larmes ; ses sanglots l’empêchaient d’exprimer ce que son âme sensible éprouvait. Dorci lui-même, trop ému, l’embrasse une dernière fois, la repousse doucement et s’éloigne.

Ô gens du siècle qui lirez ceci, voyez l’empire de la vertu sur une belle âme, et que cet exemple vous touche au moins, si vous vous sentez incapable de l’imiter ! À peine Paul avait-il trente-deux ans… il était chez lui… il était au milieu d’une forêt ; il avait dans ses bras une jeune fille charmante, que la reconnaissance lui livrait… Il versa des larmes sur les malheurs de cette créature infortunée et ne s’occupa que de la secourir[1].

  1. Cette pudeur du ci-devant comte de Dorci me rappelle celle de Jérôme Pétion. Ce girondin se cacha, étant proscrit, chez deux lingères « d’une physionomie intéressante ». Il s’habillait devant elles ; elles s’habillaient devant lui. « J’éprouvai, je l’avoue, dit-il dans ses Mémoires, ces embarras