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miné par les cantharides[1]. Le marquis, bien que caché, se fit écrire par un conseiller une lettre qui lui annonçait l’issue inévitable du procès : la roue. Muni de cette lettre, il se rend secrètement à Saumane et se jette aux pieds de sa belle-sœur, les lui baise en sanglotant, « se nomme lui-même un monstre indigne de pitié, s’accuse des plus grands forfaits et déclare qu’il va s’en punir par un suicide. » Elle tremble, elle pleure, elle le plaint doucement.

Il lui tend la lettre et lui raconte obscurément quelque drame de désespoir. « … Je sais que vous ne m’aimez pas ; je sais que vous me méprisez ! cette pensée a fait mon crime… j’ai préparé de mes mains le poison… plusieurs personnes ont succombé… le hasard m’a sauvé… je vais me faire justice. Adieu ! »

Mlle de Montreuil ne comprend rien, sinon qu’il va mourir dans un supplice infâme, et qu’elle

  1. Les Mémoires de Bachaumont, Nouvelles à la main, 1772, racontent tout autrement cette affaire. C’est à sa belle-sœur, selon le nouvelliste, que le marquis aurait, dans un dîner, à Marseille, offert les pastilles de chocolat aux cantharides. Cette version ne se soutient pas.