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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Conduisez-moi vers elle ; c’est avec elle que je veux m’éclaircir ; je ne croirai rien que de sa bouche.

— Monseigneur, dit le comte, je ne prétends point vous séparer de votre femme ; il faut qu’elle reparaisse sur le trône, mais elle ne doit plus partager votre lit. Ne vous brouillez point avec le duc de Brunswick, son père ; mais que l’honneur soit aussi sacré pour vous que la politique : en donnant quelque chose à celle-ci, accordez beaucoup à l’autre. Surveillez la conduite de cette femme aussitôt que vous lui aurez accordé la faveur de la réunir à vous. Si elle redevient honnête et qu’elle vous fasse oublier le passé, laissez alors parler votre indulgence ; mais il est bien rare qu’une femme revienne à la vertu dès qu’elle s’est jetée dans la carrière du vice. Que les moyens les plus violents l’en retirent alors, si elle continue de s’y plonger. César disait que sa femme ne devait pas même être soupçonnée : ce grand homme eût-il parlé ainsi, s’il n’eût été persuadé que la honte dont se couvre une femme rejaillit toujours sur le front de l’époux ? Allons, prince, allons, votre Adélaïde vous attend ; ayez autant de fermeté dans cette entrevue que vous montrâtes de courage quand vous eûtes des preuves de son premier crime : il n’est permis aux princes de