les autels d’un Dieu ridicule et vain, que l’examen
le plus léger de la raison pulvérise dès qu’elle
l’examine, — Évanouis-toi donc, dégoûtante chimère !
Rentre dans les ténèbres où tu pris naissance ;
ne viens plus souiller la mémoire des
hommes ; que ton nom exécré ne se prononce plus
qu’à côté du blasphème, et qu’il soit livré au
dernier supplice, le perfide imposteur qui voudrait
à l’avenir te réédifier sur la terre ! Ne fais plus
surtout tressaillir d’aise ni crier de joie les évêques
charnus à cent mille livres de rentes : ce miracle ne
vaudrait pas celui que je te propose, et si tu dois
nous en montrer un, qu’il soit au moins digne de
ta gloire. Et pourquoi donc te cacher à ceux qui
te désirent ? Crains-tu de les effrayer, ou redouterais-tu
donc leur vengeance ? Ah ! monstre, comme
elle t’est due ! Était-ce en effet la peine de les créer
pour les plonger, comme tu le fais, dans un abîme
de malheurs ? Sont-ce donc par des atrocités que
tu dois signaler ta puissance, et ta main qui les
écrase ? Ne doit-elle pas être maudite par eux,
exécrable fantôme ? Tu as bien raison de te cacher !
les imprécations pleuvraient sur toi, si jamais ta
face hideuse apparaissait aux hommes ; les malheureux,
révoltés de l’ouvrage, pulvériseraient bientôt
l’ouvrier ! — Faibles et absurdes mortels
qu’aveuglent l’erreur et le fanatisme, revenez des
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CAHIERS PERSONNELS