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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


dévoiliez un jour les ressorts de leur intrigue, vous chercheront, vous trouveront et vous feront périr : et si tout manque, votre évasion fera croire que vous ne l’avez entreprise que pour vous soustraire aux châtiments destinés aux traîtres, et vous courez les mêmes dangers. Ô ma chère dame, votre curiosité va peut-être nous devenir bien dangereuse !

— Je sens ma faute, dit Mme de Saxe, lorsqu’il n’est plus temps de la réparer… Quoi qu’il en soit, que me conseilles-tu ?

— De faire tête à l’orage, madame, de rester et de vous rendre demain chez le sénateur, ainsi que vous le lui avez promis.

Adélaïde se leva plus matin qu’à l’ordinaire pour l’exécution de ce dessein, lorsqu’elle vit, par sa fenêtre, des gardes environner sa maison.

Trois de ces fantons[1] montèrent affublés de manteaux qui, par leur ampleur, cachaient tout ce qu’ils voulaient dérober aux yeux.

— Madame, dit un de ces hommes, n’êtes-vous pas liée avec le jeune sénateur Contarino ?

— Je vois la mère, sans être liée avec le fils.

— Votre Excellence[2] se permet ici un mensonge

  1. Nom qu’on donne à Venise à ceux qui font ces sortes d’expéditions. (Note de Sade.)
  2. Même en vous menant à la mort, ces gens-là se servaient de cette expression. (Note de Sade.)