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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


voûte nocturne et semblent ne vouloir diriger leur chute que sur ce dernier port de la vie. La terre tremble, les tombeaux s’entrouvent : on eût dit qu’ils lançaient de la terre les principes de mort que leur renvoyait le ciel ; c’est l’agonie de la nature excédée des crimes de l’homme.

— Écrase-moi, dit Frédéric en invoquant la foudre ; hâte-toi de me rejoindre aux infortunés que couvre cette sombre demeure ; que mes criminelles dépouilles se purifient, s’il se peut, auprès de leurs mânes innocentes ; et, si le ciel est juste, qu’en compensation des maux que je souffre, il daigne me pardonner ceux dont je suis cause.

Frédéric, égaré, poursuit toujours ; il est l’image du pécheur que n’arrêtent point les fléaux dont la main de Dieu l’environne pour le prévenir de sa colère. Une tombe, ouverte par le frémissement subit que vient d’éprouver le sol, le fait chanceler… il croit, en cet instant, aux reflets de la foudre, apercevoir une ombre.

— Tu ne me connais pas ? lui dit une voix sépulcrale. As-tu oublié celui qui, dans Amsterdam, sut te prédire des choses si vraies ? Je suis venu finir mes jours ici, et c’est moi qui te parle. Tes malheurs ne sont pas terminés, Frédéric ; supporte-les avec courage. Dirige tes recherches