Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/289

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
269
ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Je saurai m’en garantir, dit le margrave en sortant furieux.

Et cette fois Adélaïde, dont l’usage était de manger tous les jours avec le prince, fut servie seule dans sa chambre. Ce changement à sa situation lui parut singulier. Bathilde ne la rassura point :

— Tout ceci annonce quelque chose de sinistre, madame, lui dit-elle ; croyez-moi, prenons comme à l’ordinaire, dans de semblables crises, tous nos papiers sur nous, et faisons face aux événements.

À l’heure de se reposer, elles ne se couchèrent point, mais elles s’enfermèrent soigneusement dans leur chambre. À deux heures du matin, un bruit se fait entendre ; elles écoutent et frémissent en s’apercevant que le bruit redouble. Quelque précaution qu’elles aient prise pour tenir leurs portes fermées, elles s’ouvrent avec fracas. Trois hommes saisissent Adélaïde sans dire un seul mot ; deux l’arrachent de l’appartement, pendant que le troisième s’oppose à ce que Bathilde suive sa maîtresse.

Les pleurs de cette fille, les cris d’Adélaïde, les imprécations des ravisseurs, les portes qui s’ouvrent et qui se ferment avec un bruit épouvantable, l’état de désordre dans lequel la princesse se trouve après s’être défendue, ses vêtements