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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


rage me poursuit peut-être encore dans ce tribunal ! Oh ! non, non, jamais !

— Qui vous assure, dit Kreutzer, que ses sentiments ne sont pas changés et qu’il ne fait pas l’impossible pour vous ravoir ? Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il vous cherche.

— Pour me faire périr.

— Ah ! dit le père de Bathilde, prêtez-lui des sentiments moins cruels.

— Mon cher Kreutzer, je ne l’aime pas ; je ne puis me rapprocher d’un homme que j’ai tant de sujets de craindre.

— Mais passerez-vous donc votre vie à courir l’Allemagne ? Ce rôle convient-il à la princesse de Saxe ?

— Non, j’en conviens, mon devoir m’appelle auprès de celui que mon cœur repousse ; mais j’attendrai tout du temps. Quand je serai convaincue que rien ne désarme mon époux, je me retirerai dans quelque obscure retraite, et nous verrons alors ce que me fourniront les événements.

— Veuille le ciel vous les rendre favorables, dit Kreutzer ; si vous devenez heureuse, comme je l’espère, n’oubliez pas un homme qui se fera toujours un devoir de vous servir dans tous les temps.

À ces mots, le brave Kreutzer se jeta en larmes