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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


sibles à l’enfant ; il échoue, si l’instituteur ne l’aide. Quelle précaution les parents ne doivent-ils pas apporter au choix de cet instituteur !

— Je n’en vois pas la nécessité, dit un troisième personnage en s’approchant des deux interlocuteurs. J’aime cent fois mieux abandonner la nature à elle-même, que de la grever par des conseils qui s’oublient, dès que les passions se font entendre. Il est dans l’homme, de se raidir contre les freins qu’on lui oppose ; toutes vos peines alors se trouvent perdues. Laissez faire à l’expérience ce que vous voulez produire par vos leçons.

— Sera-t-il temps, dit Frédéric, quand les fautes seront commises ?

— Ne faut-il pas toujours qu’on en fasse une ? dit le nouvel interlocuteur. C’est le moyen d’en empêcher d’autres, et il n’est rien que je craigne au monde comme la société d’un homme assez neuf pour n’avoir jamais fait de fautes. La certitude où je suis qu’il faut bien qu’il commence me fait toujours craindre de devenir l’objet de son premier tort… Au reste, ce système n’est pas toujours sûr, poursuivit notre homme, si le prince de Saxe n’eût pas fait la première faute, en étant trop indulgent sur la conduite de sa femme, il ne se fût pas trouvé contraint de faire assassiner l’amant qu’elle lui préférait.