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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


respect était dans l’ensemble de sa tournure, et c’était à l’amour qu’appartenaient les détails. Elle imposait par ses manières, mais elle séduisait par ses grâces ; et au travers de tout cela, quelque chose de si tendre et de si romantique dans les traits, qu’on devenait, en la regardant, incertain sur l’espèce de culte qu’il fallait lui rendre, et, décidé d’abord à ne l’encenser que comme les dieux, on finissait par l’adorer comme leur plus bel ouvrage.

Adélaïde venait d’atteindre sa vingt-troisième année, quand elle partit de chez son père pour être unie au prince de Saxe, qui, plus âgé qu’elle de douze ans, joignait à une figure peu agréable un esprit faible et jaloux ; ce qui n’offrait pas à côté de sa femme un parallèle fort à l’avantage du prince ; mais ces défauts étaient ceux de son siècle ; on pouvait les lui pardonner à ce titre. Quoi qu’il en fût, ils ne devaient pas rendre son hymen fort heureux : les femmes voient toujours la jalousie comme un tort qu’elles pardonnent tout au plus dans celui qu’elles aiment, et la jalousie de Frédéric ne pouvait dans ce cas que fortement déplaire à Adélaïde.

Louis de Thuringe, parent de notre héros, Louis qui venait de conduire à son cousin l’épouse qu’il eût bien volontiers choisie pour lui-même,