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d’eux ou si je ne faisais pas mon devoir.

De ce moment on me mit en possession des instrumens de la cuisine, on me fit allumer du feu, et on m’ordonna de préparer les viandes qui me furent remises à cet effet. Ne voyant qu’une parfaite obéissance et un peu de talent pour attendrir mes nouveaux maîtres, quoique je n’eus jamais fait ce métier, je l’entrepris avec un telle envie de réussir, que je leur fis un assez bon souper, ils en furent si contents qu’ils m’invitèrent à me mettre à table avec eux, ce que je fis avec bien plus de frayeur que de faim.

En préparant ce repas, j’avais bien pensé au somnifère qui m’avait si parfaitement réussi avec l’inquisiteur ; de quelle utilité ne me fût-il pas devenu dans une telle circonstance, mais en franchissant les murs de dom Crispe, j’avais eu le malheur de le perdre, et je ne l’avais pas regrettée, n’imaginant pas qu’il dût m’être sitôt nécessaire.

Quand nos brigands eurent bien soupé,