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flatteur d’acheter le triomphe de l’amour-propre, au prix des sensations de ce malheureux être immolé à notre vaine gloire ? Donc aucun obstacle à te livrer, aucun inconvénient à ce que ton époux le sache même si réellement il t’adore avec délicatesse, et s’il ne t’aime plus, quel regret n’auras-tu pas d’avoir été la dupe d’un sentiment éteint ? Quand tu lui faisais les plus grands sacrifices… Ainsi, qu’il t’aime ou qu’il ne t’aime pas, tu auras toujours eu tort de ne pas céder, et tu auras toujours à te repentir de ne l’avoir pas fait, pouvant le faire impunément. Je ne t’oppose pas la religion, je sais trop combien la justesse et la bonté de ton esprit te rendent supérieure à ces freins ridicules. Je ne combats que ton orgueil et ta folie, que ton entêtement et que tes préjugés ; je ne cherche à détruire qu’eux, trop sûre que c’est à eux seuls à qui tu sacrifies les plus doux plaisirs de la terre… Ah ! jouis-en, jouis-en Léonore ; l’âge où nous sommes créés pour eux, passe comme la fraîcheur