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avait pris le parti d’abréger ses jours, pour qu’on doutât moins de ce qu’elle annonçait, elle avait placé ce billet au fond d’une boëte, arrangé dans une de ses robes, et nous avions envoyé jetter le tout dans la rivière. On aura retrouvé le paquet, on aura reconnu l’habit, lu la lettre, soupçonné sans doute le corps dévoré, et il ne doit plus être resté dans la province de doutes sur sa mort. Pour moi, j’écrivis à mon père que je passais en Russie, guidé par le désespoir, et qu’il n’entendrait jamais parler de celui qu’il voulait rendre sa victime ; pour mieux constater ma perte totale, dans le dessein d’anéantir les recherches, je priai un ami que j’avais dans ce pays-là, d’apprendre au bout de trois mois ma mort au comte de Kermeuil ; j’ai su qu’il l’avait fait, et que mon père s’en était beaucoup plutôt consolé que des cent mille écus que je lui ravissais. — Et voilà donc, reprit le comte, ce qui légitime la lettre du chevalier de Meilcourt ; courage, courage, mon ami, ajouta le général, avec