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pour n’avoir plus à y revenir. Reprenons maintenant le fil de notre route.

Nous venions d’entrer en Espagne, lorsqu’à quatre lieues d’Alcantara, suivant un sentier sur le bord du Tage, qui devait nous conduire à notre solitude du soir ; Castellina qui était à notre tête, entendit geindre dans un fossé à gauche du chemin, elle y vole, et nous appelant aussi-tôt ; nous voyons un malheureux percé de plusieurs coups de poignards et noyé dans son sang. Je dois cette justice à cette malheureuse fille, elle eut seule l’honneur de la belle action ; quelqu’unes de nous se détournèrent avec horreur ; d’autres moins susceptibles de sensibilité, poursuivirent indifféremment leur route. La seule Castellina soulève le blessé, l’asseoit contre un arbre, coupe les linges de ses propres vêtemens, les enduit d’un beaume souverain, bande les plaies, ranime les forces du moribond, lui fait reprendre connaissance et le rend à la vie.

Restez-là, mon ami, lui dit-elle dès que